« A la demande de Fleur Pellerin, Ministre de la Culture et de la Communication, les trois groupes de réflexion que nous avons animés ont travaillé selon trois fils conducteurs : sensibiliser et mobiliser, innover et enfin développer, afin de proposer des mesures concrètes pour une Stratégie nationale pour l’architecture.
Réunis de mars à juin 2015, nous sommes partis des récents rapports Bloche et Feltesse, ainsi que des diagnostics et propositions élaborées dans plusieurs rapports antérieurs. Ces éléments ont été enrichis par des auditions et des contributions complémentaires de personnalités et d’institutions que nous tenons à remercier. Les trois groupes ont apporté leurs propres réflexions, affinées lors de réunions transversales. Ces échanges ont permis d’identifier des propositions propres à chaque groupe, et des propositions transversales, communes.
Notre rapport n’est qu’une étape, nous nous réjouissons qu’il soit issu d’une demande politique forte. L’architecture est redevenue un « sujet » commun ; nous espérons que l’ensemble des mesures proposées permettra d’élaborer une politique publique concrète, et volontaire pour l’architecture.
Cette volonté politique vient à point nommé : les métiers de l’architecture sont très fragilisés, difficulté qui est le symptôme de l’effacement progressif, dans les politiques publiques passées, de l’attention aux lieux que nous habitons, qu’il s’agisse d’édifices, d’espaces publics, de quartiers, de villes ou de villages, de paysages, ceci sur tout le territoire français. Nous insistons sur cette transversalité : l’architecture est un sujet qui concerne tous les citoyens, tous les territoires, elle est d’intérêt général –comme l’énonce la Loi sur l’Architecture de 1977- Elle ne peut donc qu’être portée par un projet politique, une parole publique affirmée et installée dans la durée –ce qui est le propre d’une Stratégie.
Portée par le ministère de la Culture et de la Communication, la Stratégie nationale pour l’architecture ne peut trouver de réponses adaptées qu’à la rencontre de plusieurs politiques publiques : écologie, logement, territoires, ville, auxquelles on doit ajouter recherche, industrie et économie. Nous avons très vite convergé sur la nécessité d’une telle transversalité. Réfléchir pour l’architecture, c’est s’intéresser à conforter les métiers de l’architecture, mais aussi à l’ensemble de ceux qui contribuent à transformer le monde où nous vivons : élus, urbanistes, collectivités, maîtres d’ouvrage ou opérateurs immobiliers, entreprises et industriels… et les citoyens que nous sommes, les habitants eux-mêmes. Une grande part de l’innovation nécessaire réside dans ces rencontres et l’expérimentation rendue à nouveau possible.
Les mesures que nous proposons sont structurées selon les trois volets Sensibiliser/ mobiliser, Innover, Développer. Elles pourront trouver, dans leur application, une autre organisation thématique.
Nous proposons des dispositifs parfois inédits, mais en nous appuyant toujours sur les ressources existantes et à consolider, au premier rang desquelles les Ecoles nationales supérieures d’architecture et leurs capacités de recherche, mais aussi les DRAC, les maisons de l’Architecture, les CAUE, les architectes conseils de l’Etat, les architectes urbanistes de l’Etat, l’Ordre des architectes, la MIQCP…
Nous pensons néanmoins qu’une instance nationale dédiée à l’architecture est nécessaire pour porter dans la durée la Stratégie nationale, en lien avec tous les autres acteurs concernés.
L’architecture, in fine, intéresse l’ensemble des citoyens. Ses plus-values économiques et culturelles sont considérables sur de nombreux secteurs. Sa production, au-delà des œuvres exceptionnelles, doit d’abord savoir répondre aux transformations des espaces ordinaires. Cette exigence ne va pas de soi : réussir l’excellence ordinaire dans les espaces du quotidien, les lieux que nous habitons tous, demande une vision politique, des métiers solides, un effort d’innovation et une intelligence collective considérable.
C’est, nous l’espérons, ce que la Stratégie nationale pour l’architecture permettra de retrouver durablement. »
Paul Chemetov, Grand prix national de l’architecture
Frédéric Bonnet, Grand prix national de l’urbanisme
Marc Barani, Grand prix national de l’architecture
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